Sorti en salles le 10 décembre, La Petite Cuisine de Mehdi signe les débuts réussis au cinéma d'Amine Adjina. Ce premier long métrage, tourné à Lyon, mêle avec finesse les saveurs de la comédie et la complexité des identités multiples. Cuisine française, références algériennes, famille recomposée, le cinéaste explore avec tendresse le poids des non-dits et la difficulté de réconcilier amour filial et quête de soi. Pour la radio du cinéma, Manuel Houssais a interrogé Younès Boucis aux Rencontres du Cinéma de Beaurepaire.
Une histoire d'identités et de plats mijotés
Le personnage de Mehdi, incarné par Younès Boucif, vit sur un fil : il est chef dans un bistrot qu'il veut reprendre avec sa compagne Léa, mais cache son amour et sa passion pour la cuisine française à sa mère algérienne, Fatima. Pour retarder l'échéance, il engage une fausse mère, campée par Hiam Abbass, etvprovoque un enchaînement de quiproquos savoureux et émouvants.
Pour Amine Adjina, « la cuisine est un lieu de mémoire, un espace de transmission où se croisent l’héritage familial et le désir d’autonomie ». En choisissant Lyon, capitale de la gastronomie et ville importante de l’immigration algérienne, le réalisateur ancre son récit dans une réalité sociale forte, tout en lui insufflant un souffle méditerranéen assumé.
Rire, loyauté et vaisselle cassée
« Mehdi compartimente tout : sa cuisine, son amour, sa mère », confie le réalisateur. Cette cloison symbolique permet au film d’explorer le mensonge comme stratégie de survie affective. Mais dans La Petite Cuisine de Mehdi, chaque secret est une cocotte-minute. À mesure que le film avance, le rire devient poignard, et la comédie glisse doucement vers l’émotion.
Inspiré par la comédie italienne mai aussi le cinéma d’Almodóvar, Amine Adjina revendique des héroïnes fortes, comme celles incarnées ici par Malika Zerrouki et Hiam Abbass. Le résultat : une comédie où les mères volent la vedette, réconfortent et malmènent, toujours dans un joyeux vacarme d’assiettes et d’accents.
Un bistrot comme personnage
Le bistrot du film, Le Baratin, est plus qu'un décor : c’est un héros à part entière. Inspiré d’un lieu bien réel à Belleville, ce bistrot a été recréé avec soin, jusqu’au choix des assiettes. « J’avais envie que chaque plan donne envie de manger », confie Amine Adjina. Il y invente un plat signature, la "blanquette de veau à lauranaise", clin d’œil à ses racines et hommage à la fusion culinaire.
Younès Boucif, révélation pleine de tact
Pour camper Mehdi, Amine Adjina a choisi Younès Boucif, révélé dans la série Drôle (Netflix). « Il fallait un acteur capable d’inspirer l’empathie, de jouer la comédie sans jamais perdre de véracité », explique le réalisateur. Younès Boucif incarne cette dualité entre pudeur et explosion comique.
Une comédie qui réunit et questionne
La Petite Cuisine de Mehdi a trouvé son public en salle. Ce qui plaît ? La chaleur humaine, la sincérité, et cette capacité rare à faire rire tout en posant des questions profondes. Identité, transmission, loyauté, adaptation... Le film ouvre des portes plutôt qu’il ne donne des leçons. Et dans l’atmosphère douce-amère qui l’enveloppe, chacun peut y retrouver un souvenir de famille, un parfum d’enfance, ou une recette jamais transmise.
Infos pratiques
La Petite Cuisine de Mehdi, un film d'Amine Adjina. Avec Younès Boucif, Hiam Abbass, Malika Zerrouki, Clara Bretheau. Sorti en salles le 10 décembre 2025. Durée : 1h42. Tourné à Lyon. Une production Elzévir Films, distribuée par Pyramide Distribution.

